mercredi 28 avril 2010

Dans les sombres recoins de mon esprit malade.

Internaute, mon jouet en caoutchouc qui fait pouic.

Tu me connais comme étant une méchante libraire, mais tout au fond de moi, se cache:

la Commerçante.

Le Prince devient "le commerçant" le matin et cesse de l'être le soir. Hop, hop, Prince/mec patient/Prince. Comme un costume qu'on enfile.
Il fait ça sans difficulté.
Il y a des fois où quand il retire son costume de commerçant, le Prince réapparait, et fout un grand coup de poing dans le mur parce que:
"Un petit con m'a tenu la jambe 2 heures de suite en me disant de pas m'endormir, que libraire c'est la belle vie, que j'en branlais pas une, Il me suivait partout dans le magasin alors que je charriais des cartons, il disait que je faisais semblant pour faire croire que je travail"
et ensuite, il s'étouffe de rage.
Je le mets en PLS, le couvre d'un plaid en polaire et lui glisse Tigrou sous le coude.
Quand il revient à lui, il est charmant.

Mais c'est très rare ( c'est quand le petit con vient en fait.) et c'est le seul dommage collatéral que j'ai pu observer quand à cette amusante capacité à passer d'un mode à l'autre.

Moi, je m'en croyais incapable. Je n'étais pas "la commerçante" jusqu'à la moelle des os. Je mettais un masque de patience, mais sous le masque la méchante libraire était toujours là, au taquet.

Et un jour...

Parfois, dans ma jolie boutique, il n'y a que des clients cools, des gens avec qui on peut parler sans hésiter de ce qui est mauvais, sans finasser, sans niaiser, sans tourner autour du pot.
Des gens à qui on ne dit pas:
"le premier est bien dessiné, mais peut être un peu laborieux"
mais plutôt "touche pas à ça, c'est chiant."
Des gens sympas qui sans être des amis acceptent de nous voir le Prince et moi comme des êtres humains avec des opinions et des faiblesses en fin de journée, et pas comme des machines à politesse et à cirage de pompe (je reparlerai des gens qui viennent dans les librairies pour se regonfler l'Ego).
Ces gens là ne sont pas si rares, c'est aussi un des petits bonheurs de ce métier.
On discute donc, on bavasse, on se conseille des films, des jeux vidéos, des romans, des expos...
Justement ce jour là, on nous recommande le Sherlock Holmes de Guy Ritchie.
Je lance alors, dans un mouvement fluide et dynamique vers le fond de ma boutique "je me méfiais, je croyais, au vu de la bande annonce que ce serait une daube immonde genre Arsène Lupin, c'était bien tout pourri ça".

Et là, c'est le drame, tout s'enchaine.

Il y avait un mec au fond de la boutique.

Pas un habitué. Un frère d'habitué. Un mec qui était là pour faire un cadeau, et qui trouvait génial l'idée de chercher seul une BD même s'il n'y connait rien, son amour pour son frère allait le guider dans sa recherche. Un mec qui à besoin d'aide mais qui, pour une raison obscure, n'en demande pas.
et qui me dit:
-"Vous avez pas aimé Arsène Lupin? c'est bien pourtant, j'ai bien aimé".

Et là, du fond de mon inconscient où elle s'était tapie après avoir pris sa volée, "la commerçante" a surgi. Elle a foncé sur la Méchante libraire qui contrôlait mon cerveau, lui a balancé un highkick dans les reins avant de lui faire une clef de bras de catcheur et de la maintenir, humiliée, au sol.
C'en était fait de moi, j'étais possédée. La commerçante annule tout sens critique.

-" Si si , c'était très bien, un bon film français, mais qui heueuue, manquait un peu de rythme"
dans ma tête la méchante libraire hurle " naaaaaaan, c'est une daube, ils ont osé y mettre du gros fantastique à 2 balles! et le coup du méchant qui a tué le père du héros qui finalement de révèle être le père lui même, ça a été interdit par le conseil narratif de Los Angeles en 87 après le dernier Star Wars!"

Et le mec remets ça, en plus il tourne en boucle:
"- C'est étrange que vous n'ayez pas aimé, moi j'ai trouvé que c'était très bien".

"La commerçante" traduit alors le message: "dépêche toi de dire que tu es d'accord avec lui, sinon quoique tu lui conseilleras, rien ne sera adapté, puisque tu viens de prouver que tu n'avais pas les même gouts que lui. Il ne reste qu'une chose à faire: ramper!"

"-Je ne l'ai pas revue depuis longtemps, et puis je n'étais pas très attentive, mais c'est une bonne idée, c'est l'occasion de le revoir après tout, il me semble me souvenir que Kristin Scott Thomas était très bien (sourire tétanique, limite rictus)".

Dans mon cerveau, la méchante libraire, toujours maitrisée, a commencé à sangloter doucement.

Et là, le type donne le coups de grâce:
"- C'est dommage que vous l'ayez pas aimé, moi je l'avais trouvé bien".
.
.
.
Et en plus il cherche même pas à se justifier.
.
.
"La commerçante" ne se laisse pas facilement abattre.
-"je peux vous aider?"
Oui, je pouvais l'aider.
Oui, il était super méfiant sur tout, j'ai galérer comme c'est pas permis.


Oui, à l'avenir, quand je laisserais s'exprimer la méchante libraire, je vérifierai tous les recoins sombres de la boutique.

Parce que la commerçante, je la maitrise pas bien, elle fait grave flipper.

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